Nous avons besoin de héros. Ils sont des références, des modèles, des intermédiaires entre les humains et les inaccessibles étoiles.
Le jeudi 28 janvier 2021, Yannick Bestaven est arrivé aux Sables d’Olonne dans l’émotion, l’exubérance et les feux d’artifices. Il vient de gagner le Vendée Globe en 80 jours 3 h heures, 44 minutes et 46 secondes. Ses concurrents sont déjà là pour certains, vont arrivés (les dernier pas avant plusieurs semaines) ou n’arriveront pas (abandon, naufrage). En tout cas ils seront tous allés au bout de leur capacité de rêve de course autour du monde en solitaire et sans assistance…
Le jeudi 22 août 1968, Bernard Moitessier qui a quitté Plymouth pour la première course autour du monde dans les mêmes conditions que ceux du Vendée Globe, a été en tête tout au long de son périple. Mais dans l’Atlantique sud, au moment de piquer au nord pour rejoindre l’Angleterre, il met le cap à l’est. Il ne gagnera pas le premier Golden Globe Challenge. Il continuera sa route pour finalement s’ancrer à un ponton d’une ile polynésienne, 313 jours après son départ, dans la plus grande discrétion, accueilli seulement par quelques amis.
A 52 ans d’écart, tous ces marins ont affronté les mêmes mers. Seule la technique a rendu la navigation des plus jeunes plus rapide et plus médiatisée. Pour le reste, ils ont tous brillé bien plus par leur force psychique que physique. Ils se sont (ce "ils" est générique puisqu’il y avait 6 femmes engagées dans ce Vendée Globe), ils se sont donc tous confrontés à des situations extrêmes où la rage d’aller au bout de leur rêve leur a fait surmonter les pires difficultés. Les tempêtes, les icebergs menaçants, les OFNI meurtriers pour les coques, etc. Jusqu’à (et c’est le cas de Jean Le Cam) se dérouter et prendre tous les risques pour aller secourir un concurrent en train de sombrer.
En réalité, de Bernard Moitessier à Yannick Bestaven, tous ces circum navigateurs sont allés plus loin que l’horizon puisqu’ils ont fait le tour du globe. Mais aucun d’eux n’aura quitté le monde des humains. D’ailleurs y en a-t-il un autre ? Aucun d’eux n’aura quitté notre radeau de survie à tous : notre planète bleue.
Alors, quand les menaces grondent, quand les dangers sont partout, sournois comme ces déferlantes qui écrasent tout sur leur passage, que ces marins, aux exploits inutiles et dans leur confinement volontaire, nous servent de phare dans la nuit quelles que soient les vagues, scélérates ou épidémiques !
Bernard LAURENT