Un ballon stratosphérique chinois a été abattu par l’aviation américaine il y a quelques jours. Il venait de survoler l’Alaska, le Canada et les Etats Unis.
« Scandale ! Proclament les dirigeants chinois. C’était rien qu’un ballon météorologique. »
« T’as qu’à croire ! Rétorque l’Oncle Sam. C’était un ballon espion. »
Si on en restait là, y’aurait pas de quoi en faire un plat de nouilles. Mais, les uns se sentant agressés et les autres menacés, les dirigeants de ces deux hyper puissances en appellent à l’opinion publique et pourraient bien laver l’affront réciproque dans une bonne guerre, que les uns et les autres préparaient d’ailleurs de longue date.
Et c’est pas une première ! L’Histoire foisonne de ces prétextes futiles aux conséquences funestes.
Prenez le cas de Jules Cesar, l’empereur romain. Vers l’an - 59/58, il alerte le Sénat sur l’intrusion de hordes suisses qui menacent les provinces du sud de la Gaule, alors sous contrôle de Rome. C’était quoi le problème ? Des patres helvètes qui crevaient de faim dans leurs montagnes et qui cherchaient des terres un peu moins stériles que leurs sommets enneigés (c’était avant les banques et les stations de ski), étaient descendu dans les vallées du côté de la Savoie. Et Jules aurait dit : « je m’en vais libérer la Gaule de tous ces bouffeurs de gruyère qui viennent égorger nos fils et nos compagnes… et je vais en profiter pour débarrasser la Gaule, (toute la Gaule sauf un petit village gaulois d’Armorique) de tous ces fascistes sanguinaires. » Et c’est en grand libérateur qu’il poussa sa plaisanterie libératrice jusqu’aux confins de l’Ecosse et qu’il écrivit la Guerre des Gaules, le premier best seller tout à sa gloire.
Je vous l’ai dit, les exemples de prétextes belliqueux sont légion (romaines si vous voulez).
Et je ne résiste pas au plaisir de vous parler du sieur Duval Pierre, consul de France et trafiquant notoire. Nous sommes sous le règne de Charles X et notre consul est à Alger pour discuter avec le Bey (c’est le boss dans ce coin de l’Empire Ottoman) d’une sombre histoire de dette que la France rechigne à rembourser. Que s’est-il passé lors de cette réunion ? On ne le sait pas exactement mais le consul aurait prononcé des paroles outrageantes sur la religion musulmane et pas content le bey lui donne deux ou trois légers coups de son éventail qui l’auraient à peine décoiffé.
Quel affront au représentant de Charles X ! La France ne pouvait pas ne pas réagir ! Et c’est parti pour la conquête et l’occupation de l’Algérie, puis du Sahara. Jetons un voile pudique sur cette colonisation qui a duré 130 ans !
Entre les p’tits suisses envahisseurs et le coup d’éventail provocateur, on aurait pu multiplier à l’envie les exemples de ces prétextes qui ne sont que de mauvaises raisons pour de funestes projets muris depuis longtemps.
Et pour conclure revenons au ballon plus ou moins espion et ré écoutons une chanson sortie en 1983 : 99 (neun und neun zig) luftballons, (99 ballons de baudruche). Nous sommes en pleine guerre froide. Nena (la chanteuse du groupe éponyme) imagine que ces ballons qui flottent dans le ciel d’Allemagne franchissent le Rideau de Fer. Aussitôt les dirigeants du Pacte de Varsovie considèrent ces ballons comme une attaque venant de l’Ouest capitaliste. C’est la mobilisation générale et c’est la troisième guerre mondiale.
Ouf ! Ce n’était qu’une chanson, et comme je ne suis pas un dégonflé je propose que l’on confie l’avenir de notre planète… aux artistes !