Un seul être vous manque et tout est dépeuplé !
C’est un constat que tout le monde, peu ou prou, a fait dans son existence après la mort d’un être cher. Cette perte efface, ou au minimum rend inintéressant, tout ce qui faisait son univers quotidien :
(Il faut vivre. Daniel Balavoine, extrait).
Mais comment et dans quel état ?
C’est un peu ce que j’ai vécu, et j’en ai honte, après avoir versé par maladresse le contenu d’une tasse de café sur mon ordinateur il y a deux semaines, une seconde après avoir mis en ligne notre magazine hebdomadaire. Je venais en un instant de détruire l’outil, l’instrument grâce avec lequel, chaque vendredi depuis octobre 2020 à la mi journée :
(J’ai rdv avec vous. Georges Brassens, extrait).
Enfer et damnation !
Une réanimation des circuits intégrés a bien été tentée par les meilleurs spécialistes, mais après un cours séjour dans l’unité de soins intensifs pour disques durs endommagés, il a fallu se rendre à l’évidence : le disque dur de mon ordinateur avait rendu l’âme en emportant dans sa tombe tous les secrets de fabrication de Culture 5 (et je ne vous parle pas de mes secrets intimes).
« Un seul être vous manque et tout est dépeuplé » ! (Lamartine, Les Méditations).
Que faire devant le vide sidéral qui désormais était devenu mon horizon ?
Comment survivre dans le désert de votre absence ?
J’ai songé à me retirer du monde et passer le reste de ma vie au sommet du piédestal d’une gloire autant éphémère que fragile, tel Siméon le Stylite en haut de sa colonne (saint chrétien 388-439).
(Tout le monde à la campagne. Charlotte Julian, extrait)
C’est alors que parvint sur mon téléphone le message d’un fidèle auditeur :
« Hé, ton histoire de café sur l’ordi, j’y crois pas… »
Ah l’incrédule ! Ah le faux-frère sans compassion ! Ah l’insensible !
« Alors comme ça tu veux nous faire croire que t’as un souci technique alors qu’en réalité t’as plus rien à dire dans Culture 5 ? »
Devant cet affront, cette mise en doute de l’authenticité de mon malheur j’ai pris deux décisions : un, j’ai acheté un nouvel ordinateur et deux, j’ai arrêté le café…et je me suis mis à la bière.
Bernard LAURENT